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Rencontre artistique avec Mathieu Bisson

Bonjour Mathieu comment allez-vous ?

 

Je me sens Groggy.

 

Vous en 4 mots ça donnerait quoi ?

Curieux pessimiste critique courageux

 

On vous a récemment vu dans Prof T, bonne première saison y en aura une deuxième ? Le public vous a adoré !

 

Non la chaîne a décidé d’arrêter la diffusion en raison de « scores décevants « . No comment . Je m’y étais préparé.. Le pessimisme, ça protège.

 

On vous a comparé à Monk à la française, personnellement je suis à moitié d’accord avec cette comparaison. Et vous ?

 

Je suis d’accord avec vous . A part les TOCS du personnage, je vois assez peu de choses en commun . J’ai pas le talent burlesque de Monk. S’il fallait oser une comparaison, je me sens plus proche en prof T du Sherlock Homes d’ « Elementary »

 

Je sais que c’est pas bien de comparer mais il y a une petite ressemblance avec Julien Boisselier qui sommeille en vous je trouve. Cette façon d’être dans les séries, une présence scénique. C’est flatteur ce que je vous dis ou c’est exagéré ?

 

C’est ce que vous pensez . Vous savez, on se ressemble un peu tous à Paris. Barbe de trois jours, parka kaki, baskets, écharpe de couleur, metrosexuel, scooter, on fait tous un peu la gueule …

 

 

Est-ce que c’est le domaine de l’art qui est venu vous chercher ou c’est vous qui êtes allé le chercher ?

 

Elle est trop mignonne cette question. Délicieusement naïve. J’ai l ‘impression de m’être toujours battu pour obtenir ce que j’ai eu donc c’est plutôt moi qui ai fait le boulot. Jusqu’à maintenant..

 

Noir ou blanc ?

 

Noir et blanc. Toujours. C’est fatigant d’ailleurs. J’aimerais bien pouvoir penser blanc sur un sujet et basta; on passe à autre chose. Tiens ça me fait penser à une citation

« Si une chose, et une seule, pouvait me définir, c'était cette incertitude, ce petit espace vide entre non et oui".

Robert Cohen dans « Ici et maintenant ». Je me reconnais absolument dans cette phrase.

 

Quand on vous voit sur scène, dans les séries, dans les films, j’ai un titre de film qui me vient à l’esprit qui me vient en tête c’est la fureur de vivre. Je veux pas jouer la grande fan je déteste ça mais j’aime beaucoup ces acteurs comme vous qui ont ce talent de se sentir vivant et qui le montre à un public. Ça vous vient d’où cette envie d’être un artiste ? Les parents y sont pour quelque chose non ?

 

J’ai tout plaqué à 28 ans et mon premier jour de tournage je l’ai fait aux alentours de 30 ans. J’ai comme qui dirait commencé tard. On appelle ça en anglais très joliment un « late bloomer ». Quelqu’un qui s’épanouit sur le tard. Je suis un late boomer dans plein de domaines. Les parents y sont sûrement pour quelque chose. Mon père était acteur. Mon désir d’être acteur, j’ai mis beaucoup de temps à l’assumer. C’est sûrement lié. Il était peut-être temps de se sentir vivant comme vous dites.

 

Quelle est à vos yeux la différence majeure entre le cinéma, la télé et le théâtre si ce n’est le changement de textes ?

 

Pour moi, c’est d’abord et avant tout la continuité. Au théâtre vous vivez la vie du personnage étape par étape tous les soirs. Vous êtes chargé en temps réel de tout ce que vous venez de vivre. C’est délicieux. En tournage, c’est le bordel. Vous jouez la mort de votre femme 1 mois avant votre mariage.

 

Quelles sont vos références au niveau cinéma et théâtre ?

 

Tous les gens avec lesquels j’aimerais travailler. Desplechin, Julien Gosselin, Les chiens de Navarre, Christophe Honoré, Xavier Legrand … très loin de TF1…

 

Que lit Mathieu Bisson lorsqu’il a du temps devant lui ?

 

Beaucoup de livres en même temps. Trop. Souvent un essai et un roman. En ce moment « le prix des sentiments « un livre de sociologie sur le travail émotionnel qu’on élabore chaque jour pour faire bonne figure dans le monde du travail   et « Ici et maintenant » de Robert Cohen. Le portrait d’un quarantenaire dont la vie est un gâchis aussi bien professionnel qu’affectif. Je suis très fan de littérature américaine. J’en abandonne beaucoup en cours.

 

Terrain connu ou terre inconnue ?

 

On rêve tous de terres inconnues. Et on fait un peu tout pour rester en terrain connu. Souvent je me rends compte que je me suis aventuré en terre inconnue après, bien après. Rarement sur le moment.

 

 

Comédie ou tragédie?

 

A chaque fois que j’aborde une scène, je me dis « allège tu ne joues pas Berenice « (ou on me le dit). Donc grosse attirance vers la noirceur. Trop. C’est mon terrain connu à moi.

 

 

Imaginez un mauvais génie vous enlève le fait d'être comédien, quelle autre forme d'art choisiriez-vous?

 

L’écriture sans hésiter

 

Un Molière à Paris ou un oscar à Hollywood ?

 

On peut choisir les deux ? Oh oui, la reconnaissance des pairs, ç’est délicieux. Combien de fois je me suis dit à voix basse le discours de réception de mon césar les larmes aux yeux. Un classique

 

Dans votre fantasme le plus fou, avec quel grand cinéaste voudriez-vous tourner ?

 

Kenneth Lonergan .«Manchester by the sea ». Ce film m’a terrassé.

 

J’ai failli passer à côté de ça dites donc, vous n’auriez pas reçu une récompense à Anjou en 2011 par hasard ? Quel souvenir gardez-vous de ce jour là ?

 

Mon seul et unique prix !!!La reconnaissance ça panse tous les bobos qu’on a reçus dans le métier. Ca dure 1 journée .

 

D’accord pour dire que vous gardez les pieds sur terre ou alors on dit que vous chopez la grosse tête avec tout le gratin d’acteurs qui vous ont entouré pendant toutes ces années ?

 

Les pieds sur terre. J’ai été reconnu par 3 personnes dans la rue à Paris pour prof T. Aucune raison de choper la grosse tête. Et puis je crois que je suis trop vieux pour ça.

 

L’important est de ne pas se prendre au sérieux ou au contraire l’important c’est d’être sérieux ?

 

L’important c’est de se prendre au sérieux dans la légèreté . IL n’y pas de profondeur sans légèreté il me semble .

 

Mathieu, j’ai posé beaucoup de questions, mais j’en ai encore 2 pour vous. Quelle est votre définition du bonheur ?

 

Le café le matin avec le journal dans un bistrot après avoir déposé mon fils à la crèche, avec le sentiment du devoir accompli

 

Et ma dernière question est: Une vie sans art c’est comme …

 

Une purée sans noix de muscade

 

Mathieu merci infiniment pour cette interview, je vous laisse le dernier mot et je vous souhaite une belle continuation artistique.

 

Ca va aller j’en suis sûr.

 

Crédit photo : 

Jean Philippe Baltel
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