Angelina Delcroix et leurs secrets

L'échange de maisons est la prémisse centrale de votre thriller. Qu'est-ce qui vous a inspirée à utiliser un concept de vacances aussi a priori inoffensif pour le transformer en un cauchemar psychologique ? Est-ce que ce cadre vous permet d'explorer plus facilement les vulnérabilités de l'intimité ?

Le concept d’échange de maison m’a toujours intriguée. Serais-je capable de laisser des inconnus entrer dans mon intimité ? Quelles portes laisserais-je fermées ? Que voudrais-je leur cacher ? De là est née l’idée de ce thriller avec une plongée dans l’intimité de l’autre, une évolution en terrain inconnu en sachant que l’autre est chez soi, une surveillance cachée, et une angoisse qui monte à mesure que les secrets sont déterrés.

L’intimité peut bien sûr devenir vulnérable quand quelqu’un a la possibilité de l’explorer sans limite. C’est ce que j’ai voulu montrer avec ce roman, et ces maisons dans lesquelles toutes les portes sont ouvertes.

Le pitch révèle que l'échange met au jour les secrets que chaque couple a laissés derrière lui. Quelle est la différence, dans l'écriture d'un thriller, entre dévoiler un secret familial et dévoiler un secret personnel laissé derrière soi dans l'intimité d'une autre maison ?

Il s’agit ici de secrets appartenant à des inconnus, qui n’ont donc à priori pas de conséquences sur directes sur la vie des personnes qui les découvrent.

À priori…

Dans ce thriller, il a fallu créer des liens entre les couples qui ne se connaissent pas, mais qui finissent par se découvrir à travers ce qu’ils ont laissé dans leurs maisons. Et rapidement, les secrets des autres entraîneront des répercussions à l’intérieur même des couples, comme un secret familial pourrait faire voler en éclats une famille s’il était découvert.

Ce roman s'inscrit clairement dans le genre du thriller domestique. En tant qu'auteure reconnue pour votre expertise en criminologie, qu'est-ce qui rend la menace qui émane du cercle familial ou d'un cadre de vie quotidien plus terrifiante que le crime organisé ou la folie meurtrière à grande échelle ?

Prendre conscience que le pire peut se produire dans un foyer une fois la porte refermée… je crois que c’est ça qui rend la menace angoissante.

Le crime organisé ne nous concerne pas, se joue loin de nous (pas toujours malheureusement…), la folie meurtrière laisse dans nos esprits le nom d’innocentes victimes, mais par chance, ce n’était pas nous…

Par contre, le cercle intime, familial, le voisinage, tout cela est proche de nous, et nous savons que le pire est possible. Il s’exprime à l’abri des regards. Il ne passe que rarement la porte de la maison.

De terribles secrets hantent beaucoup de demeures, comme le chalet de Marin et Capucine ou la villa d’Alma et Léon.

Le roman se déroule pendant la période de Noël. Est-ce que l'ajout de cette atmosphère de "magie" et de festivités sert à accentuer le contraste avec l'horreur des secrets déterrés, ou cela ajoute-t-il une autre couche de tension spécifique à cette période ?

Noël s’est imposé par le genre même de ce roman, dédié à cette période. La saison m’a permis de jouer avec l’isolement (la neige en montagne, la tempête en Bretagne), la volonté pour chaque couple de vouloir partir pour les fêtes et d’échanger leurs maisons, et le lien avec la malédiction du chalet, qui se répète à Noël…

Comment avez-vous géré l'équilibre entre la vie (forcément banale, en apparence) des deux couples et l'introduction progressive du suspense, pour que le lecteur ressente l'angoisse monter non pas par un événement spectaculaire, mais par la découverte d'éléments dérangeants dans une maison inconnue ?

Tout le suspense réside justement dans le dosage. Distiller assez d’éléments au lecteur pour lui donner envie d’en savoir plus, sans en dévoiler trop pour ne pas frustrer sa curiosité. C’est comme quand nous rencontrons de nouvelles personnes, nous savons que les premiers échanges ne sont que le haut de l’iceberg, et qu’il faudra du temps pour découvrir leur personnalité véritable. Dans ce thriller, les maisons sont magnifiques au premier coup d’œil. Des lieux rêvés pour passer Noël. Puis les couples vont les découvrir en profondeur…

Enfin, les personnages ont des vies banales, des habitudes de vie normales, des relations saines.

En apparence…