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Bertrand Schmid un auteur heureux et pessimiste

Bonjour Bertrand comment allez-vous ?

Mon été a été beaucoup trop chargé, mais cette période touche à sa fin. Je serai bientôt totalement disponible pour l’écriture.

 

Le livre qui vous a le plus marqué dans votre enfance…

Sans aucun doute Les Fleurs du mal, que j’ai lu au début de l’adolescence. Auparavant, j’avais découvert Maupassant, Molière et quelques autres, mais Baudelaire a su me toucher en profondeur. Et sans doute me marque-t-il encore. Ses Petits poèmes en prose, ainsi que sa correspondance, m’ont également nourri. Cela dit, cette lecture m’a aussi beaucoup troublé…

 

L’élément déclencheur qui vous a donné envie d’écrire…

Il n’y en a pas. Je pense que chaque écrivain suit sa logique propre. En ce qui me concerne, je n’ai pas la moindre idée du moment exact où j’ai commencé à écrire. J’ai beaucoup lu dès mon plus jeune âge. J’ai aussi commencé à écrire des histoires ou des poèmes que j’offrais à mes parents ou à mes professeurs… Assez jeune… Ma vie intérieure était riche – ou plutôt tellement tarabiscotée que je m’y perds encore. À l’âge de dix ou douze ans, il paraît que j’ai affirmé à ma mère : « Je serai écrivain, mais ça ne rapporte rien, alors je ferai des études pour trouver un travail. »

 

L’écrivain ou l’élément qui vous inspire pour écrire des livres.

De nombreuses voix littéraires me touchent, me bercent, me font frissonner, comme Artaud, Celan, Blanchot, Gadenne – plus grossièrement dit, ceux qui déjà ont les orteils dans l’abîme et regardent la chute prochaine. Je suis aussi très sensible à certains philosophes, surtout Sartre ou Levinas. Quant à un élément qui m’inspire… En fait, le mot est inexact. Je préfère dire que cet élément me préoccupe. C’est la chute. Celle de l’homme, de notre société. Je suis chaque jour plus atterré de constater avec quelles bonhomie et nonchalance nous nous y ruons, sourire aux lèvres.

 

De tous les livres que vous avez écrits, lequel selon vous est le plus réussi ? Celui dont vous êtes le plus fier ?

Aucun. Tous. Je ne sais pas. Ils sont différents. Ils m’ont tous bouffé les tripes quand ils sont sortis. Chacun à sa manière est une crise en soi. Les ai-je écrits ou se sont-ils écrits ? Allez savoir. Le processus d’écriture est une chose bien mystérieuse. Je suis très heureux de voir mon petit dernier – et premier roman –, Saison des ruines, pouvoir enfin atteindre le lecteur et lui parler.

 

La valeur sûre au niveau littéraire actuellement ?

Il n’y a pas un nom de certain, car chacun un jour ou l’autre est susceptible d’écrire un mauvais livre. Je dirai donc Un dieu un animal, de Ferrari, ou Tous les diamants du ciel, de Claro. Mais ne comptez pas sur moi pour vous dire que tel auteur mérite qu’on lise tous ses livres.

 

Le livre qui vous a ému, vous a mis une claque.

Chaque claque correspond à un moment précis de ma vie, alors c’est difficile, parce qu’il y a un ancrage. En vrac : L’Ombilic des limbes d’Artaud, La religieuse de Diderot, Le Parti pris des choses, de Ponge, Aline, de Ramuz, mais aussi Poe, Rimbaud, P. K. Dick, Beckett, Borges, Michaux, Ionesco, Tsvetaïeva… Il y en a trop.

 

L’écrivain que vous rêvez de rencontrer.

Aucun. Les écrivains sont des hommes. Je connais certains écrivains passionnants et, surtout, d’une profonde humilité par rapport à ce qu’ils font, et parmi eux j’ai la chance de compter des amis. Pour le reste, je ne rêve pas plus de rencontrer un écrivain que n’importe qui d’autre. L’on est parfois surpris de la vacuité des propos de ceux qui veulent parler, voire – pire encore – pensent parler intelligemment… La sagesse n’habite pas nécessairement les bavards.

 

Frank Thilliez, Baudelaire ou Marc Lévy ou aucun des trois ?

Baudelaire, sans comparaison possible. Je n’aime pas la littérature « de loisir ». Je ne la méprise pas, mais je pense la littérature « profonde » bien plus essentielle.

 

Si je vous dis : « lire ressemble à regarder l’horizon. D’abord on ne voit qu’une ligne noire, puis on imagine des mondes », vous me dites ?

Que c’est l’un des rôles de la littérature. Ouvrir. Pas seulement l’imaginaire, mais essentiellement soi-même.

 

Le sujet que vous allez traiter dans votre prochain livre…

Un sujet sombre. J’y travaille.

 

Trois vœux à réaliser ?

Continuer à écrire, continuer à lire, continuer à aimer.

 

Bertrand merci beaucoup pour cette interview, je vous souhaite une belle continuation littéraire. 

 

Crédit photo : ©Anne Bichsel, 2016

 

Bertrand Schmid, merci pour cette interview et belle continuation littéraire !

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