
Pascal Pellegrino, un homme HEUREUX
Bonjour Pascal, comment allez-vous ?
Etant un indécrottable optimiste en toute situation, je vais toujours bien. L’optimisme, c’est bon pour la santé.
Tout d’abord, parlez-nous de votre livre « Papa Gay »
Ce livre est paru en 2009 aux éditions Favre et a été réédité en 2016. Cette réédition indique que le sujet de l’homoparentalité reste toujours d’actualité et, à mes yeux, le restera encore longtemps. On peut même parler de sujet tabou dans notre société à qui ce mot, « homoparentalité », fait peur.
Le fait d’écrire sur votre « combat », ça été un besoin, une envie urgente ou un certain lâcher prise, une certaine délivrance ?
Je n’employerais pas le mot « combat », car je n’ai connu à combattre aucun ennemi sur mon parcours. Je dirais plutôt « désir ». Simplement ce désir d’enfant qui était le mien était plus problématique à réaliser étant homosexuel. Sur un plan légal d’abord, puisque l’adoption et la GPA (gestation pour autrui – autrement dit le recours à une « mère porteuse ») sont à ce jour toutes deux interdites aux homosexuels dans mon pays la Suisse (et dans l’écrasante majorité des pays du globe). Je n’ai donc songé à aucune de ces deux solutions, car je ne désirais pas concevoir un projet d’enfant en dehors d’un cadre légal.
Pour que mon désir d’enfant trouve une chance de se réaliser, j’ai opté pour ce qu’on appelle la « coparentalité » (soit une collaboration parentale dans laquelle les parents ne vivent pas en couple sous le même toit, mais s’unissent pour élever un ou plusieurs enfants dans deux foyers séparés, mais complémentaires).
Mon livre n’est donc pas motivé par un lâcher prise ou une forme de délivrance. J’ai davantage été poussé par une volonté pédagogique : face aux nombreuses questions qu’on m’a posées et face à la peur de certains par rapport à ce qu’on appelle l’homoparentalité, j’ai voulu expliquer, rassurer et informer.
Est-ce que pendant l’écriture de ce livre, il y a eu des moments de doute, des moments où l’on se dit : c’est fini j’arrête tout. ?
Des moments de doute, certainement. Lorsqu’on est seul face à ses lignes et qu’on doit tenter de retransmettre une aventure de vie à un lectorat qui ne vous connaît pas, on n’est jamais sûr de soi. En tout cas lorsqu’il s’agit d’un premier livre. Après, lorsqu’on en écrit un deuxième, peut-être acquiert-on des mécanismes stylistiques qui peuvent nous rassurer. De mon côté, en rédigeant le manuscrit, je me suis souvent demandé si ce que j’écrivais pouvait intéresser celle ou celui qui me lirait. En revanche, je n’ai jamais eu l’intention de « tout arrêter ». Ce n’est qu’au moment de la recherche d’un éditeur que j’ai pensé que ce livre ne paraîtrait peut-être pas, car j’ai essuyé de nombreux refus de la part des maisons d’édition.
On vous a vu récemment à la télé sur une chaîne francophone, parler de vous de votre bonheur actuel. Pourquoi avoir accepté l’invitation ?
La production de l’émission « Mille et une vies » sur France 2, à laquelle vous faites allusion, m’a contacté parce qu’elle était intéressée de retracer le parcours que j’évoque dans « Papa gay ». J’ai accepté l’invitation pour les mêmes raisons qui étaient les miennes d’écrire ce livre, soit dans une volonté de pédagogie, une envie de rassurer les personnes à qui le mot « homoparentalité » fait peur et l’espoir de pouvoir « offrir des clés de réflexion » à toute personne se trouvant face à un projet parental similaire au mien.
Le syndrôme de la page blanche pour votre livre Papa Gay, il est survenu en vous ou même pas ?
Non, car c’est ma vie que je racontais. Donc d’une certaine façon, le livre était « déjà écrit ». Je n’avais qu’à faire une sélection parmi les éléments que j’avais à disposition dans ma vie et les architecturer de façon à ce qu’ils soient transmissibles à une lectrice ou un lecteur qui ne me connaît pas.
Est-ce que maintenant on peut dire que vous êtes un homme heureux ?
Pas seulement maintenant ! Je n’ai jamais cessé d’être heureux !
Est-ce que vous trouvez que la société dans laquelle on vit a évolué sur le sujet d’être papa et homosexuel ou on a encore beaucoup de travail à faire ?
Oui, l’évolution est incontestable dans notre société occidentale. Et oui, il reste du travail à faire. Mais, comme en toute chose, l’évolution n’est compatible qu’avec une certaine lenteur. En contrepartie, cette lenteur est le gage d’une évolution réussie.
Parlons un peu de littérature si vous voulez bien. Quel est le livre que vous avez détesté lire pendant votre adolescence ?
Il y a eu peut-être quelques livres à l’école, parce qu’on était obligés de les lire. Mais je n’ai jamais détesté lire. En revanche, il est un univers que je n’ai jamais pu pénétrer, c’est celui de Proust. J’ai tenté d’y revenir à plusieurs reprises dans ma vie, en vain. J’ignore pourquoi, mais je suis imperméable à cet univers-là. Ce n’est pas pour autant que je le déteste !
L’écrivain que vous rêvez de rencontrer ?
J’aurais aimé rencontré Agatha Christie, Dostoïevski ou Stefan Zweig. Aujourd’hui, j’aimerais rencontrer Amélie Nothomb. Je suis passionné autant par son personnage que par l’excellente auteure qu’elle est. Et puis, j’ai une grande tendresse pour quelqu’un comme Jean d’Ormesson. Cependant, je dois reconnaître que le fait de
rencontrer des auteurs dont vous avez aimé les livres peut s’avérer dangereux, car vous avez le risque que cette rencontre fantasmée aboutisse à une relative déception.
Imaginez que je vous donne l’occasion d’écrire un nouveau livre, quel en serait le sujet ?
Je rêve d’écrire une fiction, qui serait un roman philosophique. J’ai le sujet en tête. Maintenant, la seule chose qui me manque est le temps et la disponibilité. Donc, ce sera pour plus tard, dans quelques années…
Beauté ou avoir ?
Les deux sont d’une certaine façon incompatibles. Pour contempler la beauté d’un pays par exemple, il faut avoir les moyens de s’y rendre. Cela dit, j’ai la chance d’être quelqu’un qui ne s’habitue pas à la beauté en toute chose ou en tout être. La beauté m’émeut toujours aussi intensément.
Michel Bussi, Harlan Coben, ou Marcel Pagnol ?
J’avoue n’avoir rien lu des deux premiers auteurs que vous citez. Alors je choisirais Marcel Pagnol, car il est de ces auteurs qui savent prendre le lecteur par la main avec douceur et l’emmener dans leur univers.
Pascal Pellegrino je vous laisse le mot de la fin !
Alors ce sera le mot de la faim. La faim de vivre de nouvelles expériences, de découvrir de nouvelles choses et la faim d’aimer sans trêve les gens que j’aime.
Que peut-on vous souhaiter aujourd’hui ?
Du bonheur, rien que du bonheur.
Pascal Pellegrino je vous remercie pour cette interview et je vous souhaite une belle vie.
Grand merci à vous et à vous aussi je souhaite une vie remplie de belles surprises.
Crédit photo : Alexandre Puglisi