
Rencontre avec Victor Guilbert et son nouveau thriller Terra Nullius
Bonjour Victor parlez-nous de votre thriller « Terra Nullius» comment est-il né ?
Terra Nullius est un terme qui désigne un pan de terre qui n’est revendiqué par aucun état. J’ai inventé ce territoire à la frontière entre la France et la Belgique, une zone composée d’une décharge et d’un bidonville à la population éclectique. Un enfant est assassiné dans la décharge et Hugo Boloren, un flic parisien un peu lunaire (déjà présent dans mon précédent roman Douve), est justement de passage à Lille pour amener sa mère dans une clinique spécialisée dans la maladie d’Alzheimer. Il va s’incruster dans l’équipe de la PJ lilloise pour résoudre l’affaire.
Ça faisait un moment que j’avais en tête l’image d’un enfant habillé en armure de bric et de broc contemplant une décharge depuis le sommet d’un monticule de déchets. Je n’arrivais pas à m’en débarrasser. Il y a un conseil d’écriture que j’aime bien : il faut se méfier des idées soudaines qu’on trouve géniales quelques heures, en revanche, il faut se pencher sérieusement sur des bribes d’histoire dont votre cerveau ne veut pas se débarrasser.
Quelle a été la source d inspiration pour écrire ce livre ?
J’ai toujours aimé la thématique des gens un peu à part. Dans Douve, mon précédent roman, on était en présence de villageois vivant reclus. J’ai écrit une pièce de théâtre aussi, « L’histoire probablement vraie d’un village qui n’exista probablement pas », qui racontait l’histoire d’un village peuplé d’originaux dans un pays dictatorial. Cette fois, je me suis penché sur une population de laissés-pour-compte en tout genre vivant à la frontière entre deux pays. La Belgique considère qu’ils sont en France et la France estime qu’ils sont en Belgique.
Est-ce que les personnages du livre sont réels ou c’est de la pure fiction ?
C’est de la pure fiction, mais avec évidemment beaucoup d’inspiration puisée dans mon entourage. Comme mon flic, Hugo Boloren, qui a une bille qui se balade dans son cerveau quand il enquête sur une affaire criminelle. Je ne l’ai que partiellement inventée, mon père a vraiment la bille.
Pourquoi avoir écrit cet ouvrage ?
J’avais cette histoire en tête, j’ai la chance d’avoir un éditeur demandeur, mon flic Hugo Boloren me manquait… Je n’avais aucune raison de ne pas l’écrire !
Quel est l élément déclencheur qui vous a donné l envie de devenir auteur ?
Ça s’est fait progressivement. J’ai commencé par de la poésie et des nouvelles… Puis j’ai fait une école de théâtre, je voulais être comédien, j’ai écrit des pièces de théâtre qu’on jouait avec ma troupe, des textes de chanson qu’on chantait avec mes groupes… Et progressivement, j’ai fait de moins en moins de scène et de plus en plus d’écriture. Je rêvais d’écrire une pièce de théâtre policière, mais en France ça n’attire pas vraiment le public. Alors je me suis tourné vers le roman. Douve, mon premier polar, était d’abord une pièce de théâtre.
Vous dans le style hyper romantique ça l’aurait fait ou pas du tout ?
J’aurais adoré savoir écrire des histoires d’amour, des romans de passions torturées… Mais j’ai un certain goût pour le second degré qui ne va pas bien avec l’hyper romantisme. Peut-être dans une deuxième vie, quand j’arrêterai enfin d’assassiner mes personnages.
Un livre à 4 mains ça se tente ou même pas en rêve ?
Dans un format spécifique avec des rôles bien définies, ça me tenterait. Par exemple en bande dessinée, m’associer à un dessinateur. Je l’ai pratiqué avec un scénariste de cinéma : je m’occupais du développement de l’histoire et lui de la partie technique de cette écriture. Mais l’écriture d’un roman à plusieurs, ça me semble impossible.
Le syndrome de la page blanche on l’a déjà eu ou on l’aura jamais ?
J’ai des tonnes de textes qui attendent dans un tiroir (dans le disque dur de mon ordinateur pour être exact), et que j’ai envie de terminer sans trouver le temps. Donc, non, la page blanche, je ne connais pas. La vraie difficulté, c’est de terminer ce que je commence !
Votre conseil pour devenir auteur ?
Ce n’est pas super original, mais je pense qu’il faut s’acharner. Sur le texte d’abord, il fait être dur avec soi-même, reprendre ses écrits plusieurs fois avant d’aller en quête d’une maison d’édition. Un éditeur m’a dit un jour qu’un livre digne d’être publié finira toujours pas l’être. Et je pense aussi qu’il ne faut jamais chercher à plaire, ne pas rajouter une histoire d’amour sous prétexte qu’il en faut une ou une intrigue en Suède dans la neige parce que c’est la mode. Il faut écrire les livres qu’on aurait aimé lire.
Le dernier livre que vous ayez lu c’était quoi ?
J’aime bien lire plusieurs livres à la fois, à condition que ce soient des genres différents. En ce moment je lis « Nom » de Constance Debré en même temps que « Dans les brumes de Capellan » d’Olivier Norek. Deux ambiances, deux réussites.
Le livre qui vous a le plus marqué dans votre vie d auteur ?
Je pense que le roman qui m’a le plus donné envie d’écrire, qui m’a le plus impressionné, c’est « Aurélien » de Louis Aragon. 600 pages durant lesquelles il ne se passe rien et c’est impossible à lâcher. L’écriture de ce bouquin est d’une justesse et d’une précision exceptionnelles.
Votre prochain livre, il parlera de quoi ?
Ce sera une troisième aventure pour Hugo Boloren. Je n’arrive pas à m’en détacher.
Votre ouvrage en 3 mots ?
Canicule, bière, magnétophone
On se donne rendez vous dans 10 ans avec un livre aussi passionnant que celui-ci ?
C’est sympa, je suis pour. Ça nous mène à 2032, il peut se passer beaucoup de trucs d’ici là. C’est un peu angoissant de se figurer une époque où des gamins nés en 2000 auront 32 ans… J’espère qu’écrire et avoir un éditeur toujours motivé feront encore partie de ce futur.
Merci beaucoup pour cet entretien et belle continuation littéraire